Donner un visage humain aux prisons du Bénin

Le problème des droits humains est préoccupant au Bénin surtout dans les lieux de détention. Les réformes en cours permettent l’amélioration des conditions de détention et la promotion de la réinsertion sociale des détenus.

PNUD Bénin
5 min readAug 2, 2019
Un détenu faisant du tissage de pagne à la prison civile de Parakou

Il sonnait 9 heures. A la maison d’arrêt de Porto-Novo, ce mercredi- là, dans le hall de visite, une douzaine de détenus assis le visage renfermé, attendent d’être transportés au parquet. « Secrétaire D5 Major urgent », lance un portier, micro en main. Une minute plus tard, le portillon s’ouvre et la personne demandée sort de la foule, qui grouille à l’intérieur de la Cour de l’établissement pénitentiaire.

Sur les 11 établissements pénitentiaires au Bénin, la maison d’arrêt de Porto-Novo est la plus ancienne. Créée en 1892, elle a une capacité d’accueil de cinq cent (500) places, mais comptait, à la date de notre visite en juin 2019 environ neuf cent (900) détenus. En tant que maison d’arrêt, elle ne devrait servir que pour la détention préventive, mais se trouve obligée d’accueillir également des condamnés.

L’amélioration des conditions de détention est au cœur des recommandations adressées par la communauté universelle, à la présentation de chaque rapport de l’Examen périodique Universel (EPU) par le Bénin depuis 2008. L’EPU est un mécanisme unique du Conseil des droits de l’homme ayant pour but d’améliorer la situation des droits de l’homme dans chacun des 193 États membres des Nations Unies.

Une équipe conjointe composée des partenaires nationaux de mise en oeuvre des projets et du staff du PNUD en visite de suivi sur le terrain échange avec le régisseur de la prison civile de Parakou

Humaniser les prisons

L’ignorance des populations sur leurs droits, la négligence des services, les pesanteurs sociologiques, la faible capacité des institutions notamment des tribunaux, des structures administratives, des organisations non gouvernementales en termes de ressources humaines, matérielles et financières sont autant de défis à relever en matière de promotion des droits humains au Bénin.

Depuis 2015, le PNUD en partenariat avec le Gouvernement du Bénin contribue à renverser la tendance, dans le cadre de la mise en œuvre du Projet d’Appui à l’Amélioration de l’Accès à la justice et de la Reddition de Compte (PAAARJC) qui poursuit, entre autres objectifs la lutte contre la détention préventive abusive et la promotion de la réinsertion sociale des détenus.

M. Léandre Sèdaminou, Régisseur de la prison de Porto-Novo

« Beaucoup d’efforts sont faits pour humaniser les établissements pénitentiaires et renforcer la promotion et la protection des droits de l’homme depuis la création de l’Agence pénitentiaire en décembre 2017 dont la devise est Surveiller et éduquer», a reconnu M. Léandre Sèdaminou, Régisseur de la prison de Porto-Novo.

Treize (13) stagiaires régisseurs de prison ont été formés en Management des unités pénitentiaires en décembre 2018 avec l’appui du PNUD.

Dans le cadre de la lutte contre la détention préventive abusive, environ deux cent soixante-treize (273) détenus identifiés comme en détention irrégulière sur environ neuf cent (900) détenus en avril 2018 bénéficient progressivement de mesures de libération appropriées suite à la visite des établissements initiée avec l’appui du PNUD quelques mois plus tôt. A l’occasion de la fête nationale, le 1er août 2019, le Président de la République vient de gracier 400 prisonniers.

« Lorsqu’un détenu reste assis à longueur de journée sans rien faire, il développe des vices. Quand il a la chance de sortir de la prison, il va revenir parce qu’il a perdu l’habileté de se prendre en charge, d’où la nécessité de le former », raconte Gaspar Denanvidé, Régisseur de la Prison civile de Parakou.

Formation pour une réinsertion post-carcérale des détenus

Concernant la promotion de la réinsertion sociale des détenus, au total 2297 détenus dont 180 femmes et 67 mineurs sont formés dans les onze (11) établissements pénitentiaires du Bénin en fabrication de différents types de savon (solide, liquide et en poudre) et en fabrication d’eau de Javel grâce à l’appui du PNUD. Tous les produits fabriqués sont destinés à l’usage interne dans les établissements pénitentiaires pour l’hygiène corporelle et vestimentaire des détenus et pour l’entretien des locaux. Par ailleurs, cent-soixante (160) détenus, en l’occurrence les femmes, sont formées en fabrication de bijoux à base de perles. D’ores et déjà, les détenus s’occupent à ces activités qui contribuent à leur épanouissement psychosocial et économique.

A Parakou, le cadre est aménagé pour former les détenus sur une base volontaire à divers métiers de leurs choix : jardinage, fabrication de savon, fabrication de bijoux en perles, tissage de pagne, élevage de petits ruminants, taillerie, coiffure, etc.

La lutte contre la stigmatisation des détenus est l’un des problèmes à prendre à bras le corps après leur remise en liberté. En 2017, après la libération deux personnes âgées perçues comme sorcières dans leur communauté, ont été rejetées par la communauté. L’une des deux a été même brûlée vive.

Les actions du PAAARJC à venir vont se focaliser aussi sur la sensibilisation des communautés pour un meilleur accueil des détenus à leur libération.

Photos et texte : Elsie Assogba /PNUD Bénin et Laurent Gbessi / VNU

--

--

PNUD Bénin

Le PNUD est le réseau mondial de développement dont dispose les Nations Unies. Il appuie le Bénin à relever les défis d’un développement humain durable.